Naviguer dans la complexité

Le mot complexité vient du latin complexus, "ce qui est tissé ensemble, imbriqué..." et qualifie donc bien l'environnement dans lequel nous évoluons tous.
L'être humain en particulier, la vie en général, est par nature complexe, emplie de contradictions et divers paradoxes, de tensions et de seuils, de concret et d'irrationnalité, du connu et de l'imprévisible. Il est facile alors de croire que tout cela est “compliqué”, que tel choix nous paraît “compliqué, que lorsque l’on pense à la situation que nous vivons, nous disons que “c’est compliqué”. Or nous nous trompons... En fait, la plupart du temps, nous devrions parler de complexité, non de complication. La différence ? Elle est fondamentale et faire cette distinction peut nous simplifier la vie.

 

Complexe vs compliqué

 

Ce qui peut est compliqué, si vous n’êtes pas scientifique, c’est résoudre un problème de maths ou la modélisation d’un système physique, ou, si vous n’êtes pas à l’aise avec la plomberie, de concevoir une installation de chauffage, ou encore voire de réparer le moteur de votre voiture si vous n’avez jamais ouvert de capot de votre vie… Le premier point commun de ces situations : il y a de nombreux éléments, variables, concepts. Le deuxième, c’est que nous, l’être humain, avons créé cette complication. Et en fait, un bon ordinateur qui peut effectuer de nombreuses tâches facilement, en arrivera à bout aisément. Tout est question de puissance, de temps et de savoir, et de bons capteurs.

Pour un système complexe c’est différent. Les éléments, tous différents, sont imbriqués les un dans les autres de sorte qu’ils interagissent entre eux, et il existe également une part d’inconnu, d’irrationnel.

Une voiture est un système compliqué, de part sa conception. Rajoutez un conducteur, et vous créez un système complexe. C’est bien d’ailleurs pour cela que la voiture autonome est un concept qui ne pourra seulement qu’effleurer la complexité que sa description devrait avoir pour que cette voiture soit totalement interdépendante avec son environnement, lui-même complexe. Un embryon de solution consistera à intégrer des règles éthiques culturelles, mais ceci est un autre sujet...

Quelques règles de navigation

 

Alors comment faire pour naviguer dans cette complexité de manière plus sereine ? Il suffit d’en comprendre les mécanismes. Contextualisée, cette compréhension nous éclaire et simplifie nos choix.

 

En voici quelques éléments :

  • Nos comportements sont le résultat d’une complexité mêlant émotions, pensées, sensations, évènements vécus, plus moins ancrés. En fait, ils sont la conséquences ces imbrications qui nous conduisent à agir, plus ou moins consciemment, tout comme l’empreinte enfouie de certaines anciennes relations nous font rejouer, dans le monde professionnel, des comportements inadaptés.
  • Une impossibilité à faire un choix est parfois le résultat d’une tension entre un désir et une peur, le premier faisant croître la seconde, qui a son tour peut faire diminuer le premier, créer l’immobilisme, la frustration et éventuellement faire ressentir de la culpabilisation. Et si les deux rivalisent de concert, l’impossibilité de choix peut se transformer en angoisse. Il est alors important d’aller explorer ces désirs et ces peurs pour sortir de ce mécanisme délétère.
  • Exercer pleinement son libre-arbitre c’est avancer dans l’inconnu. C’est l’oeuvre d’art de l’irrationnalité. C’est parce que justement l’être humain est plus qu’une machine, qu’il exerce avec certes plus ou moins de compétence, son irrationnalité. Explorer notre manière, unique, de faire face à cet inconnu, nous rassure dans notre capacité à prendre de nouveaux caps.
  • Vivre une situation paradoxale c’est recevoir deux signaux qui nous paraissent contraire. Une des voies est de monter d’un cran dans la lecture de ces paradoxes. Ce qui peut, par exemple, être bloquant par une lecture de nos seules capacités ou compétences, peut être limpide au niveau de nos croyances, tel de penser qu’un dirigeant se doit d’être autoritaire, rendant impensable d’accéder à ce type de fonction, alors qu’il est plus simple de se dire incompétent à diriger car justement on ne peut ou ne veut être ce type de dirigeant, alors que nous en avons l'envie et le leaderhsip.

Appréhender la vie, c'est comprendre et intégrer ces mécanismes; s'épanouir professionnellement, c'est aussi vivre avec la complexité des autres, de l'environnement mais surtout, et avant tout, avec la sienne. Lorsque l'on accompagne, être à l'écoute de cette complexité est un atout majeur : l'information qui nous parvient est très riche et peut paraître confuse. Il nous appartient de distinguer et de proposer de nouveaux liens, de mettre en lumière certains signaux faibles, d'outiller notre intuition en proposant des modèles. Être efficient, c'est parfois et souvent, faire avec la personne que l'on accompagne les détours nécessaires, ceux qui nous rapprochent, plus ou moins consciemment, de l'objectif visé.

 

Dans tous les cas, pour rendre une situation moins “compliquée”, acceptons et comprenons-en la complexité, il nous en sera plus simple d’en sortir.

 Pour aller plus loin : "Introduction à la pensée complexe", Edgar Morin, Editions du Seuil

Écrire commentaire

Commentaires: 0